vendredi 14 mai 2010

Wovenhand – The Threshing Floor

Fidèle à une image aussi opaque que le noir de ses chemises, David Eugene Edwards reste une des grandes énigmes de la musique folk américaine. Auteur de certaines des plus belles perles des années 90 avec 16 Horsepower, il s’obstine depuis 2000 avec un Wovenhand qui peine à convaincre sur disque. Jusqu’à présent, seuls les albums Consider The Birds et Mosaic étaient parvenus à approcher le sublime des temps jadis.

Même constatation avec The Threshing Floor, encore tout chaud dans les bacs et à mon humble avis le moins bon de tous les albums de Wovenhand. Trop produit, trop mal produit ou justement trop bien produit ? Il n’en demeure que sur disque, David Eugene Edwards s’éparpille derrière des artifices qui diluent justement le cœur de sa musique : des notes et des textes censés lui sortir des tripes mais qui percent mal un brouillard d’effets sonores reproduisant (plutôt mal) des ambiances de marche militaire du XIXe siècle, des univers inspirés de la musique native américaine, voire carrément certaines harmonisations médiévales.

Le verdict est sans appel : d’une oreille ou de l’autre, The Threshing Floor est une immense déception, même si tout n’est pas à jeter aux orties. On pourra toujours retenir la splendide ballade Singing Grass (et dans une moindre mesure His Rest) qui se démarque justement par son côté très dépouillé. Et éventuellement le titre The Threshing Floor qui, sans être transcendant sur l’album, s’est révélé d’une puissance phénoménale sur scène… Et oui : nous voilà arrivés à la question cruciale : et en live, ça donne quoi ?

Wovenhand était de passage à l’AB ce mercredi. Le cœur serré de cette nouvelle déception sur CD, j’y allais la tête pleine de doutes. Il n’aura fallu qu’une poignée de secondes au prêcheur du Colorado pour remettre l’église au milieu de la scène. Le cul qui ne tient plus en place sur son tabouret, David Eugene Edwards y revisite son répertoire avec toute l’énergie et le mysticisme qu’on est en droit d’attendre de la part d’un musicien aussi possédé. Le corps traversé de secousses, il offre en concert une lecture nettement plus brute et intense de ses compositions. Malgré les tensions qui ont mené à la séparation de 16 Horsepower, le bassiste Pascal Humbert reste fidèle au poste. Sur les planches, l’alchimie est parfaite : ce dernier, absorbé par sa musique, ne fait plus qu’un avec son instrument, le regard perdu entre ici et là-bas. Quant à David Eugene Edwards, si ses yeux ne se révulsent plus comme à la grande époque, il s’extirpe toujours avec autant de passion. Les mains tremblantes, il exécute chaque nouvel accord de guitare comme un spasme qui lui serait dicté d’ailleurs.

D’où cette constatation un peu amère : comment un groupe aussi puissant sur scène parvient-il à foirer avec autant de dextérité le résultat sur album ? Une énigme, je te disais…

A regarder : un petit concert acoustique privé (et la fameuse "banjoline")



A écouter : Singing Grass



Les liens : 

Le site officiel
Sur MySpace
Lilium (Pascal Humbert)
Le label Glitterhouse

1 commentaire:

Steve a dit…

"The Threshing Floor" is their best album since "Consider the Birds". It has such a great variety of sounds and images. There's a few tracks that are drowned in noise, but at least half of them really stand out - the title track, A Holy Measure, His Rest, Singing Grass, and Behind Your Breath are my favorites.

This is like a glorious return to form after "Ten Stones", which was just like one big, noisy wall of static and noise.